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AMOUR TROUBADOUR EN CHANTANT
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  • Quête de connaissances oubliées avec un esprit troubadour. Partage de contes poétiques et de poèmes-chants d'amour, illustrés de photos de nature, pour célébrer l'Amour, la vie et les troubadours.
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30 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (14)

8/ Le trésor de Loreley, l'Or du Rhin, réalité matérielle?

L'homme du fleuve en était persuadé, sa Loreley était une déesse qui avait accès à un trésor et l'exprimait par ses chants. Pourtant il ne savait toujours pas comment la retrouver, aussi il poursuivit ses recherches. Afin de mieux la comprendre, il enquêta sur le plus connu des trésors mythiques associés à une Loreley, l'Or du Rhin.
De quelle nature était-il? Et d'abord était-il de nature matérielle?

L'homme du fleuve me parla de la fièvre qui saisit les hommes dès qu'il s'agit d'or. Les nazis pendant la seconde guerre mondiale avaient conçu d'énormes machines pour draguer le Rhin, ils en avaient seulement extrait quelques centaines de grammes. Il existe encore aujourd'hui quelques orpailleurs à l'affût de quelques rares pépites charriées par le fleuve. Depuis la légende des Niebelungen écrite au XIII° siècle à partir de sources datant du VIII° siècle, le mythe du trésor englouti suscite rêves et convoitise.

Ces maigres résultats n'empêchèrent pas d'autres aventuriers de prendre le relais mais pas forcément dans le cours actuel du Rhin. Il a en effet été rectifié au XIX° siècle, auparavant il suivait de nombreux méandres qui ne sont donc plus alimentés. Ainsi au début des années 80, dans un bras mort du fleuve à Neupotz une dragueuse retire d'une gravière un formidable butin! Voir ici.

Tr_sor_englouti

Trésor englouti

Les hypothèses modernes sont maintenant étayées par des preuves tangibles: il y a bien de l'or et des trésors dans le Rhin, engloutis lors des passages des tribus germaniques attaquées par les Romains lorsqu'elles revenaient chargées du butin des expéditions en Gaule, ... Le trésor des Niebelungen serait peut-être le trésor des Burgondes qui a disparu lors de leur défaite sous les coups des Romains alliés aux Huns.

L'or du Nord
Mais cet or ne satisfaisait pas l'homme du fleuve, il continua à chercher et tomba alors sur la fabuleuse histoire de l'ambre parfois nommé l'or rouge ou l'or du Nord, il était au moins aussi précieux que l'or dans l'Antiquité, c'était une monnaie d'échange pour de nombreux peuples, en particulier les Romains.

Ambre_fossile

Ambre fossile

* L'ambre était nommée bernstein en allemand: pierre de l'ours, c'est peut-être la déformation de "bornstein", pierre qui brûle, évoquant sa transformation : le feu réduit la pierre à l'état d'encens (d'une odeur de résine, agréable aux dieux de l'Antiquité). Il était surnommé "larmes des dieux" en particulier de Freiya, la grande déesse nordique correspondant à Vénus.
Chez les Celtes, le dieu de l'éloquence, Ogmios était un vieillard relié aux hommes par de fragiles liens d'ambre que les hommes n'envisagent pas de rompre tant ils ont l'air d'être satisfaits d'être ainsi liés au dieu. L'ambre est le symbole de l'énergie divine, solaire, symbole du lien spirituel, cosmique avec le dieu.

Cette matière fossile aux propriétés considérées comme magiques, thérapeutiques, esthétiques... a aussi des propriétés électriques (electrostatisme par frottement, c'est même l'origine du mot électricité: le nom de l'ambre jaune étant "elektron").
Par ailleurs l'ambre était utilisé pour faire des lentilles qui servaient par exemple pour allumer les feux rituels. Dissous dans l'huile de lin, il fournit un vernis qui reflète la lumière de manière exceptionnelle comme l'or.
L'ambre est originaire principalement de la mer Baltique, au Nord de l'Europe. Ainsi on le trouve parfois sur les rives des pays périphériques (dont l'Allemagne), arraché à la mer par les tempêtes.

* Document Pdf, Christian Mandon racines.traditions.free.fr/ambre/ambre.pdf

J'avais des difficultés à le suivre dans son enthousiasme, l'ambre dont je ne mettais pas en doute la valeur antique représentait-il vraiment le trésor du Rhin?
Il m'apprit que le Rhin et le Rhône étaient effectivement des couloirs de navigation commerciale très importante dans l'Antiquité et que trois routes acheminant de fabuleuses richesses avaient façonné l'histoire des hommes, il s'agissait de la Route de l'étain, la Route de la soie et la Route de l'ambre.

Il me parla aussi de la fabuleuse histoire vraie de la "chambre ou cabinet d'ambre" du Palais de Catherine de Russie près de Saint-Pétersbourg.

Ph_1938

Chambre d'ambre en 1938

C'était au départ un cadeau du roi de Prusse Frédéric-Guillaume I° fait au tsar de Russie Pierre le Grand en 1716, il était constitué de décors et panneaux d'ambre de plus de 6 tonnes pour une surface de 55 mètres carrés. Il a disparu pendant la seconde guerre mondiale, récupéré par les nazis, peut-être a-t-il été englouti lui aussi lors de son transport par bateau. Le cabinet d'ambre a été reconstitué dans le Palais de Catherine et l'on peut le visiter depuis 2003. (Pour le découvrir en vidéo, voir ici)
Photos extraites de cette même vidéo :

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Ambre_1 ambre_2

Chambre d'ambre

Par ailleurs l'ambre était aussi appelé Pierre d'Odin, en l'honneur du dieu des dieux nordiques, ou Pierre de soleil.

Photo_ambre

Photo ambre

Et selon l'homme du fleuve ce n'était pas seulement parce qu'elle était particulièrement belle ou dorée pour certaines variétés exposées au soleil, mais parce que les initiés l'utilisaient secrètement pour s'orienter même dans les brumes du Nord!
Là j'étais intriguée, je sentais que cela dépassait la valeur matérielle de ce matériau étrange. Il m'expliqua que l'ambre comme certains cristaux avait un aspect particulier sous la lumière polarisée, celle du soleil et du jour même brumeux au point de ne plus voir le soleil. La polarisation est la direction de vibration de la lumière. L'ambre exposé perpendiculairement à la direction de la lumière révèle ainsi où est le soleil, il suffit de tracer un symbole sur la surface ou d'exploiter ses inclusions pour ne plus perdre le Nord! (*Voir article de Christian Mandon déjà cité).

Etait-ce un effet d'optique? Lorsque je regardais l'homme du fleuve, une lueur mystérieuse allumait son oeil et je m'aperçus qu'il avait des yeux couleur d'ambre: tout un trésor m'apparut en un seul regard! Quelle perspective...

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17 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (13)

7/ Les chants des déesses dans l'univers mythique nordique.

L'homme du fleuve était retourné sur son lopin de terre avec la cabane au bord de l'eau. Il n'espérait plus revoir sa bien-aimée dans le cadre où il l'avait vue pour la première fois, mais une nuit il entendit un chant venir de la rive. Il essaya de voir d'où il venait, tout en craignant que le chant ne s'arrête, puis il se contenta d'écouter. En rêve, il vit au pied d'un arbre immense, sa bien-aimée Loreley lui dire: "ne cherche pas à me voir, cherche à m'écouter là" et elle désigna son coeur avant de disparaître.

Il murmura alors son nom tout doucement et au réveil il se souvint avoir entendu dire que Loreley était une sorte de kenning, métaphore ou périphrase poétique scandinave voilant la connaissance du peuple (Lore) en rapport avec la Tradition ou Loi ancienne (lei ou lay ou loy).

Par ailleurs, un lay ou lai en littérature est une forme de récit plus ou moins poétique et parfois chanté qui date des débuts de la littérature de création au Moyen-âge. En ancien allemand Leich signifie jouer une mélodie ou une chanson.

Dans la mythologie nordique, la représentation du monde selon la connaissance traditionnelle incluait la notion de chants. Nous avions déjà vu que la Loreley était associée à la légende des Niebelungen et Clemens Brentano, bon connaisseur des mythes et légendes traditionnelles, disait que la Loreley avait participé à la création du monde.

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Les Nornes et l'Arbre, wikipédia

Dans la légende des Niebelungen, les Valkyries occupent une place importante. Elles sont des vierges guerrières, des divinités mineures ou dises qui servaient Odin, maître des dieux. L'une des plus célébres d'entre elles s'appelle Brunehilde, elle apparaît aussi dans la Tétralogie de Richard Wagner, L'Anneau du Nibelung. Elle a chanté les runes (signes symboliques abstraits nordiques assimilés entre autres à un alphabet) pour le héros Sigurd.

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Brunehilde et Sigurd Arthur Rackham (vers1900)

Pour mieux explorer l'univers de Loreley, l'homme du fleuve s'était donc intéressé à Odin: pour acquérir Connaissance et sagesse, il était resté pendu neuf jours et neuf nuits (équivalent de neuf mois, temps de gestation pour une nouvelle naissance) à l'arbre du Monde, le frêne Yggdrasil, transpercé par sa propre lance (assimilée à l'axe du monde).
Il sacrifia un oeil dans le puits de Mimir en échange de quelques gouttes de son "immense sagesse", son oeil flottant dans le puits était la Lune.
Il apprit neuf chants de puissance et dix-huit runes. Son oeil ouvert était le Soleil rayonnant, grand dieu cosmique il commandait les puissantes Valkyries et menait la Chevauchée des âmes de l'autre monde.
(Pour découvrir une interprétation-synthèse des neuf chants des Runes, cliquer ici)

L'homme du fleuve me fit remarquer que Odin après son sacrifice d'un oeil (la Lune) porte un grand chapeau au-dessus de son autre oeil (le Soleil). Ce grand chapeau est l'une de ses caractéristiques constantes (une histoire de chapeau sur le soleil cela ne rappelle-t-il pas le fameux Saint Goar?)

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Odin et son grand chapeau

Yggdrasil est l'archétype de l'Arbre de Vie, centre et axe cosmique, neuf mondes l'entourent composant l'univers qui est par ailleurs représenté par l'image de la toile du Destin, le Wyrd reliant et gouvernant tous les êtres. Cette toile est sans cesse tissée par trois Nornes (Il n'y a pas de distinction claire entre les Valkyries et les Nornes, ce sont des dises). Elles résident près d'un puits et arrosent de son eau chaque jour Yggdrasil. L'homme du fleuve me rappela que dans le conte de la Petite Sirène, elle a un bel arbre dans son jardin dont elle s'occupe aussi, or Sirène et Loreley sont apparentées... Andersen avait puisé à la source!

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Arbre Yggdrasil

Cette conception d'une toile-univers comporte des implications d'ordre philosophique ou métaphysique: chaque action ou événement ponctuel retentit sur toute la toile. En langage moderne selon la physique quantique*, on évoque "l'effet papillon"! La sagesse traditionnelle redevient moderne!
*Une infime variation d'un élément peut s'amplifier progressivement, jusqu'à provoquer des changements énormes au bout d'un certain temps.

Dans ce système les runes sont des sortes de clés de cet univers. Chaque rune est comme une partie d'un hologramme : chacune, tout en ayant ses propres caractéristiques, reflète la totalité de la toile du Wyrd.

Vision traditionnelle de l'effet papillon : à petite cause, grand effet, (faute de clou, on perdit le royaume !!!)

Faute de clou, on perdit le fer
Faute de fer, on perdit le cheval
Faute de cheval, on perdit le cavalier
Faute de cavalier, on perdit la bataille
Faute de bataille, on perdit le royaume

(Pour un résumé de la conception nordique de l'univers, cliquer ici.)

Ainsi pour l'homme du fleuve c'était évident, les chants de la Loreley étaient les chants de la Connaissance du monde (les lais de Lore) et s'ils étaient maintenant perdus puisque leur transmission s'était interrompue, il avait tenté d'y accorder toute son attention aiguisée par son amour pour sa bien-aimée pour les comprendre.

10 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (12)

6/ Déesse Mère, Sirènes et Loreley

Je retournais voir l'homme du fleuve, son voyage en Allemagne l'avait renseigné sur la nature de sa Loreley, il s'agissait effectivement d'un personnage complexe dont l'image populaire était probablement trompeuse, mais je ne voyais toujours pas qui elle était vraiment.
Lui-même à l'époque avait continué ses recherches et les avait élargies aux "esprits des eaux". Il me conseilla de cibler en particulier les sirènes et les manifestations de la Déesse Mère dans son aspect aquatique.
Comme je ne comprenais pas le rapport entre la Loreley et les Sirènes, l'homme du fleuve me dit que l'apparence des sirènes n'était pas le plus important, elles pouvaient avoir des ailes, une queue de poisson ou de serpent, se transformer en dragon ou en humain. Ce n'est que vers le VIII°siècle (en parallèle avec l'implantation du christianisme et ce n'est pas un hasard!) qu'elles furent représentées avec une queue de poisson dans les bestiaires médiévaux.

Ainsi comme nous l'avons déjà vu pour les dragons, les anciens croyaient vraiment aux sirènes? Selon l'homme du fleuve certains animaux marins ou aquatiques pouvaient effectivement donner corps à ces légendes. Je l'acceptais après avoir vu ce moment de câlins incroyables entre un éléphant de mer et une touriste! Ici

Quelques photos extraites de ce document exceptionnel sur Dailymotion:

1 2

3 5

Novembre 2009, éléphant de mer câlin!

Revenons à notre sujet, la sirène que je connaissais le mieux était celle d'Andersen, La petite sirène. Elle n'avait quand même pas de rapport avec la Loreley?

Petite_sir_ne

La petite Sirène inspirée du conte d'Andersen 

Copenhague

L'homme du fleuve m'affirma qu'au contraire, j'étais sur la bonne piste! Christian Mandon* le dit : La “sirène de mer” qui surveille l’entrée du port de Copenhague est une Havfrue, “Freyja des mers” ou “Freyja du havre (port)”, analogue aux Loreleys allemandes qui peuplent le Rhin.

*(racines.traditions.free.fr/sirenes/sirenes.pdf)
Andersen, contrairement aux critiques superficielles qui lui sont faites, a su réconcilier des visions différentes à la fois païennes et chrétiennes dans son conte. Son passage difficile sur terre fera aspirer la petite sirène à un destin différent et la mythologie scandinave est évoquée en particulier par le thème de l'arbre que la petite sirène arrosait dans le palais de son père, mais aussi par les différents niveaux d'existence, Eau, Terre, Ciel...

Voir ici, (texte remarquable qui remet dans son contexte culturel et mythologique ce conte).

Comme quoi il faut se méfier des apparences! Mais le chant des sirènes alors, est-il une malédiction ou autre chose? Je me souvenais d'Ulysse attaché au mât de son navire pour résister à ce chant. Les sirènes de nos rivières aussi avaient parfois un chant ensorcelant que les cloches d'église empêchaient de nuire. (Voir par exemple sur ce site une version complète de ce type de conte en Gascogne).

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Herbert James Draper, Ulysse et les Sirènes (Wikipédia)

Homère dans l'Odyssée, conte le voyage et le retour d'Ulysse, il transcrit le Chant des sirènes:

Viens, illustre Ulysse, gloire des Achéens!
Arrête ton  navire! Ecoute notre voix!
Jamais mortel n'a doublé notre île sur son noir vaisseau,
sans écouter notre douce voix,
Il repart alors plein de joie et de savoir.

...
Nous savons tout ce qui arrive sur la terre nourricière.

Les sirènes, par leur chant transmettaient joie et savoir. Et lorsque l'on écoute comme un troubadour, on pense Joi (qui correspondrait à l'aspect érotique attribué aux sirènes-maîtresses d'amour) et Connaissance...
Mais pour y résister, Ulysse qui ne fait que passer, demande à être attaché au mât de son navire. Joi et Connaissance sont accessibles à celui qui fait le chemin, passant d'abord par le sacrifice, la mort au "petit moi", vers le "commencement" (sens de "initiation" comme nous l'avons déjà vu).
Par leur chant, les sirènes symbolisaient l'Harmonie tout comme l'atteste Platon, dans La République, livre II, elles chantaient en harmonie avec les Moires (personnifications du destin).
Voir C. Mandon racines.traditions.free.fr/sirenes/sirenes.pdf

J'insistais: elles sont quand même des symboles de mort!
N'allons pas trop vite, me répondit l'homme du fleuve, nous devons d'abord remonter à la source de la représentation symbolique. Comme nous l'avons redécouvert au XX° siècle, l'essentiel des symboles qui nous sont parvenus, bien que souvent déformés viennent des anciens égyptiens et de leur écriture hiéroglyphique. Ils représentaient l'âme du mort sous forme d'un oiseau (le Ba), tardivement à tête humaine et c'est sous cet aspect que l'on voit les sirènes dans le monde grec antique. Par ailleurs le poisson était le hiéroglyphe utilisé pour "écrire" corps. Pour résumer, l'oiseau est la nature purement spirituelle, l'âme du mort; le poisson, la nature matérielle, le corps.
Avec la déformation liée à la transmission de concepts qui ne sont plus compris, on obtient des représentations de femmes-poissons ou plus anciennes de femmes-oiseaux.

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Sirènes grecques antiques

Au temps d'Euripide, tragédien grec du V° siècle avant notre ère, sur les tombes figuraient deux sirènes, femmes-oiseaux, nous dit Robert Graves (Les Mythes Grecs). On fait dériver leur nom de "seirazein" , attacher avec une corde. Elles auraient représenté les formes jumelles de la déesse, celle qui annonce le règne du nouveau roi et celle qui pleure l'ancien.
D'ailleurs leur nom même confirme leur lien avec la déesse. Les cordes étaient faites de chanvre ou de lin, or Isis était nommée la déesse du lin. La déesse est en effet aussi celle qui tisse ou file le destin de toute chose.
Par ailleurs, on en trouve encore une confirmation avec les attributs de la sirène : peigne, symbole d'ordre mais aussi du sexe féminin; et miroir représentant les astres, soit la Lune, le Soleil ou encore en astrologie Vénus Aphrodite grande déesse de la fécondité et de l'amour. (Ici en anglais, en français ou coller sur la barre Google whiterosesgarden.com/Enchanted_Waters/mermaid_article et choisir traduire)

Là, l'homme du fleuve m'avait convaincue, l'analogie entre le personnage de la Loreley et les sirènes des mythes et légendes, révélait bien une filiation avec la Déesse-Mère.
Satisfait du résultat de nos réflexions, l'homme du fleuve me montra alors un extrait d'un hymne à la Déesse-Mère (Ishtar en l'occurrence, hymne mésopatamien).

Reine du Ciel, Déesse de l'Univers.
Celle qui marche dans un chaos terrible
Et qui apporta la vie par la loi de l'amour
Et qui hors du chaos nous apporta l'harmonie
Et depuis le chaos nous guida par la main.
...

Le Destin de toute chose
Elle le tient dans Sa main.
La Joie nous vient de son regard.
Elle est le pouvoir, la magnificence.
Elle est la divinité qui protège.
Elle est l'esprit qui guide.
Qu'elle soit jeune fille ou mère,
Toute femme se souvient d'Elle et appelle Son nom.
...

Louangez la Déesse, la plus puissante des divinités.
Révérons la Maîtresse des Peuples,
Plus haute que toutes les autres divinités.
Révérons la Reine du Ciel,
Plus haute que toutes les autres divinités.

Adapté de Ancient Mirrors of Womanhood, (Miroirs anciens de la féminité) ouvrage de Merlin Stone, professeur d'Université en histoire du XX° siècle.

5 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (11)

Complément sur la littérature : l'archétype de la Loreley et les écrivains

Loreley, femme fatale, figure de Salomé?
L'émergence du mythe de la Loreley au XIX° siècle accompagne l'évolution de celui de Salomé, tiré des Evangiles, qui demanda  la tête de Saint Jean-Baptiste à Hérode, elle est associée à une "danse des sept voiles" entrée dans la légende.
Ce n'est pas un hasard et c'est probablement la même représentation d'anima à la fois fascinante et dangereuse qui émerge à cette époque en réaction à la place des femmes et du féminisme montant dans la société.
De même que pour la Loreley, c'est Henrich Heine qui contribue à faire de Salomé un personnage mythique important au XIX° siècle, il fait de Hérodiade-Salomé (il associe mère et fille en une même figure) une incantatrice dotée de pouvoirs occultes ; mais surtout il la transforme en amoureuse passionnée qui sombre dans la folie.

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Gustave Moreau Salomé, 1876

Erika Tunner nous dit : comme Circé, Hélène, Dalila, Hérodiade ou Salomé, la Lore Lay était faite pour séduire l'imagination des poètes décadents. ... la figure de Salomé avait également hanté l'esprit de Brentano...
Cette figure de femme fatale alliant la perversion et la séduction, déclenche chez l'homme du XIX° désir et répulsion. Elle représente pour l'homme qui se laisse envoûter un danger de mort.

Complexité du personnage de la Loreley dans la littérature du XIX° siècle.
Au-delà de l'aspect femme fatale prédominant, une palette plus riche se dessine, voici quelques aspects de cet archétype féminin mis en valeur par les différents écrivains dont nous avons déjà parlé (ici).
Nous nous sommes inspirés du remarquable document Pdf:
*Le regard fasciné d‘écrivains français sur l’Allemagne (XIX°, XX° siècle) de Isabelle Vacher
http://deposit.ddb.de/cgi-bin/dokserv?idn=98963812x

Brentano donne une image d'une douceur maternelle englobant le cosmos, il évoque même son chant comme un murmure.
(p 197*) un extrait de la ballade de Godwi sur la Loreley :

Chante tout bas, tout bas, tout bas,
Chante en murmurant une berceuse
De la lune apprend la sagesse,
Qui parcourt si tranquillement le ciel.
[...]
Chante un chant si doux
Comme la source coulant sur le gravier
Comme les abeilles dans les tilleuls
Murmure, chantonne...

Clemens Brentano dans Godwi

Nerval perçoit la Lorelei comme un Janus allemand, il y incorpore le charme et la menace. Il est subjugué par cet être et face à la Loreley tout comme à l'Allemagne son attitude est marquée par un mélange de fascination et d’inquiétude. (Sa mère est morte en Allemagne où il a vécu étant jeune).

Pour Apollinaire cette femme n’a aimé qu’elle-même et son pouvoir maléfique se retourne contre elle. Dangereuse pour les hommes, elle l'est aussi pour elle-même, c'est une malédiction qui pèse sur elle et la conduit à la mort.

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Naïade et l'endormi, Waterhouse

(p 234*) Les légendes habitent le Rhin et sont à l’origine de drames sans nom. Brentano s'en inspire, le Rhin est un sanctuaire où gît la Lorelei en compagnie du trésor des Nibelungen.

(p 242*) La Lorelei, issue de sa plume de Brentano, demeure avant tout la muse de tous les écrivains, indépendamment de leur nationalité.

Heine, l'évoque sous les traits d’une sorcière mais aussi sous la symbolique du refus des convenances et de la morale bourgeoise.

Elle hante les paysages rhénans, c'est la muse des artistes qui font le voyage pour ressentir l’atmosphère de son rocher.

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H-J Draper Kelpie

4 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (10)

5/ Archétype féminin et Loreley

Je demandais à l'homme du fleuve s'il avait mieux compris sa vision en allant à la rencontre de la Loreley. Au début il ne s'était pas senti concerné ne voyant pas le lien entre ce qu'il avait vécu et ces légendes anciennes. Mais peu à peu il constata que chacun voyait différemment le même personnage, y compris lui. Pour la rencontrer de nouveau il devait aller au-delà de ses multiples apparences, découvrir sa nature profonde.
Il se demanda qui était la Loreley, femme fatale, héroïne maudite, sorcière ou ancienne déesse déchue? Autant d'images contradictoires signaient la présence d'un archétype féminin très fort sur lequel se projetaient les fantasmes révélateurs d'une vision du féminin et d'une époque.

Il me définit ce qu'il entendait par archétype: un symbole primitif et universel appartenant à l'inconscient collectif de l'humanité et se concrétisant dans les contes, les mythes, le folklore, les rites, etc., des peuples les plus divers.

Il fallait donc faire un tour du côté des explorateurs de conscience, ainsi Jung parlait de la Loreley comme étant un des esprits des eaux dont le chant mène les hommes à la mort. Ce personnage mythique était un archétype féminin négatif.

Selon l'homme du fleuve, la Loreley était une figure de l'anima. Pour désigner l’archétype féminin, symbole universel de la femme, Carl Gustav Jung s'était servi du mot latin anima qui signifie âme et désigne l'image inconsciente de la femme en général. Elle désigne aussi la part féminine, c'est-à-dire les caractéristiques habituellement attribuées aux femmes, sensibilité, émotivité, intuition, sentiment qui s'expriment en chaque homme. Pour en savoir plus en anglais, voir ici ,ou traduction française
ou *copier/coller sur Google eve3.wordpress.com/2007/11/01/the-anima et choisir "traduire".

Water_Nymph_Collier_L
Chant_sir_nefemme_d_eau_Draper


L'anima se présente d'autant plus sous un aspect négatif que l'homme (ou la société de référence en ce qui concerne la culture) ne l'intègre pas en lui-même. Marie-Louise von Franz, collaboratrice et continuatrice de Jung va jusqu'à l'identifier à une démone de la mort, une femme fatale. La Loreley germanique ou les sirènes dans la culture grecque puis européenne incarnent la projection de ces illusions destructrices sur le féminin et sur la relation avec la femme par le biais d'un érotisme réducteur déclenchant une répression secondaire le plus souvent.
Pour en savoir plus , voir ici ou traduction, (faire comme en * : en.wikiquote.org/wiki/Marie-Louise_von_Franz)

Sir_ne_Sheila_Wolk

Sirène Sheila Wolk

Je dis à l'homme du fleuve que nous sommes dans une époque évoluée, nous sommes épargnés par ce genre de projections et de rapport avec une anima négative. Mais il répondit qu'il suffit de consulter - en prenant du recul - des interprétations chrétiennes de l'interférence des esprits des eaux avec notre monde actuel. (Par exemple Michelle d'Astier)

Mais à quoi sert-il de comprendre que la Loreley est un archétype?
Il m'expliqua que dans son expérience son évolution spirituelle était liée à une confrontation aux archétypes en les respectant comme des réalités à part entière.
L'archétype est un médiateur entre les anciens dieux dans leur dimension sacrée, notre part personnelle de divin et notre vie ancrée dans le quotidien actuel.

Bon, d'accord les archétypes peuvent être importants pour l'évolution personnelle d'une personne, mais comment évoluent les légendes anciennes du Rhin dans notre monde actuel du XXI° siècle?
L'homme du fleuve me parla avec enthousiasme d'un musée ouvert depuis quelques années à Worms, sur le Rhin, créé autour du mythe de l'Or du Rhin et de l'Anneau des Nibelungen. C'est le premier musée se référant ainsi à un mythe!
Le fil directeur de cette entreprise s'inspire des chants (ou lied en allemand) anonymes du XIIe siècle, et ses détournements politiques sont aussi abordés, en particulier sa récupération par l'idéologie nazie au XX° siècle.
Ce musée utilise une méthode tout à fait moderne pour nous faire découvrir tout un pan de culture de l'humanité et cela ne concerne pas que les enfants.

Il existe aussi un musée dédié à la Loreley sur son rocher au bord du Rhin. Ouvert depuis 2000, le Centre d'accueil de la Loreley invite à un voyage dans le temps, des origines du paysage domestiqué jusqu'à nos jours, autour du thème central du mythe de la Lorelei.

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Loreley sur le Rhin

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4 juin 2010

Danse et handicap, un merveilleux spectacle d'artistes chinois

Merci à l'amie qui m'a transmis cette vidéo, formidable leçon d'espoir et de dignité pour tous les être humains handicapés ou non. Un travail extraordinaire qui se fait pourtant oublier pour mettre l'art et la créativité au premier plan. L' humain est parfois un être fabuleux...

Inspiré du commentaire sur Dailymotion. Elle : jeune chinoise, amputée d'un bras. Lui : amputé de jambe non appareillé. Je ne sais pas d'où provient cette vidéo, mais elle est très belle. A la fois pour les symboles qu'elle véhicule, mais aussi pour la grâce et le sens artistique des deux danseurs.

1 juin 2010

Les chants de Lore, Loreley (9)

4/ La trace des anciens dieux

En continuant à chercher, l'homme du fleuve découvrit qu'en fait Saint Goard était un "faux saint", un remplaçant du dieu forgeron Govannon. Un autre nom de cet ancien dieu-personnage mythique est Saint Genard.
Govannon est le nom gallois (ou gaulois) qui signifie "forgeron". En irlandais, il devient le dieu Goïbniu, dérivé de gobha qui est aussi en rapport avec le forgeron. Le dieu forgeron est le fils de la déesse Mère Dana ou Brigit.
Il prépare des festins dans l'autre monde où l'hydromel et la bière qui sont servis aux convives les transforment en immortels.

L'homme du fleuve s'intéressa aussi au mot Goard. En troubadour, il remarqua que l'on pouvait entendre Go Ard, soit gau, ard. Gau lui évoquait justement ce vieux terme de la joie des troubadours.

Les deux mots (joie et gau) dérivent du latin gaudia (Dictionnaire étymologique de la langue françoise, Volume 2 Par Gilles Ménage... (1750))

Ard est une racine celte signifiant soit haut, élevé, fort; soit sombre, noir. Mais ard se retrouve aussi dans "ardent" qui se rapporte au feu, au soleil. Goard pourrait évoquer la joie (au sens spirituel, sacré) du feu (solaire ou du forgeron...).


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Saint-Goard, Loreley sur le Rhin


Localement Saint-Goard se situe effectivement sur la rive ouest du Rhin avec une forteresse située en hauteur, mais quel lien entre le dieu forgeron, le lieu haut "qui garde" et le soleil ou le feu?
A ce sujet, l'homme du fleuve me rappela les miracles attribués à Saint Goard: l'un d'eux faisait effectivement intervenir le soleil. Le saint aurait posé son chapeau sur un rayon de soleil. Or poser ce couvre-chef ou même un vêtement (cape ou manteau) sur le soleil revient à le masquer, le faire disparaître. Et c'est ce qui se passe au mont de Saint-Goard situé à l'ouest du Rhin: de son sommet il cache le soleil couchant pour les riverains. En poète inspiré à l'âme d'enfant, on peut bien imaginer que le dernier rayon du soleil disparaissant ainsi ait servi à accrocher un accessoire du saint, son chapeau ou un manteau!

Mes idées s'embrouillaient, nous avions d'une part un saint Goard remplaçant un dieu forgeron et d'autre part des traces d'un dieu solaire (du soleil couchant). Quel pouvait être le dieu en question?
L'homme du fleuve sourit et me livra son hypothèse : l'étude des mythes, des légendes anciennes et de la toponymie (noms de lieux) avaient gardé le souvenir de ce personnage. Il s'agissait du dieu Gargan, Rabelais s'en était inspiré pour le personnage de Gargantua dont il conta brillamment les aventures.


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Pantagruel


Gargan, le grand dieu gaulois était le fils de la déesse mère Belisama, éternelle vierge fécondée par l'esprit divin du dieu Bélénos, une des personnifications du soleil*. Il rappelait le grand dieu irlandais le Dagda, le dieu bon (modèle du Bon Dieu?).

* Voir pour plus de détail le document Pdf Dieux celtes  sur religion.mrugala.net

D'accord, on découvre peut-être localement un dieu pré-celtique, mais quel est le lien avec la Loreley?
L'homme du fleuve tenait manifestement à présenter ses arguments pas à pas, il craignait que je ne le suive pas s'il passait directement à la conclusion.
Le forgeron était pour les peuples de l'antiquité un personnage très important, il utilisait la terre, l'eau, le feu, le métal venu du ciel (fer météoritique au début) pour transformer une matière apparemment inerte en une autre matière très organisée et fondamentale pour l'économie des tribus: les armes et outils. Le forgeron était assimilé aux premiers alchimistes et était crédité d'un accès aux connaissances de l'organisation de la création et du cosmos. D'où le dieu forgeron..., détenteur des secrets du feu de la terre comme du feu solaire.
Gargan était un dieu solaire mais il était aussi lié à l'eau tout comme sa parèdre ou sa mère qui lorsqu'il s'agissait des dieux anciens était probablement la même personne sous différents aspects, et toujours la déesse mère.

De ce fait la Loreley associée à Goar pourrait être un aspect tardif et déformé de la déesse mère!

L'homme du fleuve souriait de mon étonnement. Il finit de me déstabiliser en affirmant que par ailleurs le poète-musicien en tant qu'organisateur des représentations du monde par le verbe ou les sonorités, et le forgeron étaient intimement lié dans la conception antique. Odin était nommé par les scandinaves "forgeron des chants", chants du monde sans aucun doute!

En breton le mot goar, en gallois le mot gwyr signifiait "il connaît". L'homme du fleuve était-il un goar en ce sens? Il éclata de rire et me dit que s'il fallait le définir, il serait plutôt une sorte de troubadour... et il entonna aussitôt une ballade de sa composition inspirée d'une prière à Belisama, la "très brillante".


A toi la Brillante

Je te dédie ce chant sacré
A toi qui brilles comme la lumière
Et dont la beauté hante mes pensées
Autant que je puisse te les destiner.
Tu m'apparais dans le secret de l'âme
Tel un idéal de douceur et d'ardeur.
Tu fais chanter les coeurs combattants,
Ta paix donne confiance aux vieillards.

Etoile qui règne parmi les étoiles,
Reine du ciel et de la terre,
Je me jette à tes pieds transi d'amour.
Montre moi le soleil sur ton visage
Et mes jours seront lumière.
Accorde-moi ta connaissance
Des secrets du monde et de la vie
Dans l'amour qui unit les âmes
Et me conduit vers toi sans retour.

Toi ma reine et ma déesse
Laisse-moi te témoigner mon amour
Qui se renforce de jour en jour,
Donne-moi à boire le nectar de la coupe
Qui se déverse dans les coeurs épris
Et donne l'immortalité de l'âme.
J'implore ta bénédiction grande reine,
Accueille-moi sur ton sein où je renais
Afin de te servir sans défaillance.
Jusqu'à la délivrance entre tes bras
Au dernier jour de mes jours.

Adapté par Marie Duval

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